Atlas Social de la métropole nantaise

Au-delà de la ville attractive

Des familles monoparentales plus nombreuses et concentrées dans le logement social

par François Madoré

planche publiée le 23 avril 2020

Les familles monoparentales ont beaucoup augmenté ces dernières décennies, conséquence de la fragilisation de la vie de couple et de la multiplication des ruptures d’unions. Elles sont constituées pour l’essentiel de femmes, ont un niveau de vie inférieur aux couples avec enfant(s) et sont bien plus souvent affectées par la pauvreté, du fait notamment d’un moindre accès à l’emploi. Elles occupent plus souvent un logement locatif social, d’où leur concentration spatiale dans les grands ensembles de la métropole nantaise.

Ruptures d’unions et familles monoparentales

1Si la famille monoparentale n’est pas un fait nouveau dans la société française, la place qu’elle occupe et les modalités de sa constitution sont en revanche nouvelles. En effet, le nombre de familles monoparentales avec enfant(s) de moins de 25 ans a quasiment triplé entre 1975 et 2016 et elles représentent désormais un quart des familles avec enfant(s) en France, contre un dixième en 1975. Cette augmentation des familles monoparentales résulte principalement de la multiplication des ruptures d’unions, alors que jusque dans les années 1960 le décès précoce d’un des parents, le plus souvent le père, en était à l’origine. Désormais, les quatre cinquièmes des familles monoparentales sont la conséquence d’une séparation, le décès d’un des deux parents n’en expliquant plus qu’une part résiduelle, tandis que 13 % sont formées sans que les parents n’aient même jamais vécu ensemble (selon la définition du couple par l’Insee).

Des familles de taille réduite avec peu d’enfants en bas âge

2Les familles monoparentales habitant l’aire urbaine de Nantes en 2016 sont un peu moins nombreuses qu’à l’échelle nationale, puisqu’elles représentent 21 % des familles avec enfant(s) de moins de 25 ans et 8 % du total des ménages. C’est d’ailleurs dans la France de l’Ouest, et plus particulièrement en Pays de la Loire, que ce taux est le plus faible, avec 19 % (maximum en région PACA avec 28 %). Les familles monoparentales de la métropole nantaise présentent en 2016 certaines caractéristiques démographiques similaires à celles que l’on observe en France. Elles sont constituées principalement, dans 80 % des cas, d’une mère qui élève seule un ou plusieurs de ses enfants. Elles sont également plus petites que les familles constituées d’un couple : un peu plus de la moitié d’entre elles ne comptent qu’un seul enfant, contre un tiers parmi les couples (figure 1). Enfin, les enfants qui vivent dans une de ces familles sont en moyenne plus âgés que ceux qui résident avec leurs deux parents : seuls 6 % d’entre eux ont moins de 3 ans contre 15 % de ceux qui vivent dans un couple ; mais 61 % ont entre 11 et 24 ans, contre 45 % pour ceux qui grandissent dans un couple (figure 2). Ces résultats s’expliquent par un double processus : d’un côté, la rupture d’union diminue la période de vie commune et donc la probabilité d’avoir plusieurs enfants ; de l’autre, la séparation intervient plus rarement lorsque les enfants sont en bas âge et, lorsque le couple se sépare, le plus jeune des enfants est déjà âgé en moyenne de 5 ans en France.

Figure 1 : Des familles monoparentales ayant en majorité d’un enfant

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Figure 2 : Des enfants âgés de plus de 10 ans le plus souvent

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Des situations sociales fragiles

3Dans l’aire urbaine de Nantes, les parents vivant dans des familles monoparentales occupent moins fréquemment un emploi par rapport à ceux qui sont en couple, ce qui s’observe également à l’échelle nationale. C’est encore plus vrai pour les femmes vivant seule avec leur(s) enfant(s) que pour les hommes : seules 74 % d’entre elles sont actives et en emploi, contre 84 % des hommes (figure 3).

Figure 3 : Une moindre présence des mères de famille monoparentale sur le marché de l’emploi

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4Cette situation moins favorable des familles monoparentales sur le marché du travail explique largement la situation sociale plus difficile de ces familles, constat également valable à l’échelle nationale. D’une part, les familles monoparentales de l’aire urbaine de Nantes disposent d’un niveau de vie médian inférieur de 26 % à celui de l’ensemble des ménages (16 071 € de revenu annuel disponible par unité de consommation contre 21 780, l’unité de consommation permettant de comparer les niveaux de vie de ménages de tailles ou de compositions différentes). D’autre part, la proportion des prestations sociales dans la composition de ce revenu y est trois fois supérieure (15 % contre 5 %). Enfin, ce niveau de vie inférieur amène les familles monoparentales à résider plus fréquemment que les autres types de ménages dans le logement locatif social : 39 % d’entre elles y habitent en France métropolitaine selon la dernière enquête logement de l’Insee en 2013 (données non disponibles pour l’aire urbaine de Nantes), soit le double de la moyenne nationale. Cette forte surreprésentation dans le logement social caractérise donc sans surprise la géographie résidentielle des familles monoparentales nantaises. Si leur part dans le total des ménages varie peu que l’on soit dans la ville-centre, en banlieue ou dans la couronne périurbaine, des poches de concentration spatiales ressortent nettement dans les quartiers de grands ensembles d’habitat social de la métropole nantaise (figure 4). À Bellevue, au Breil-Malville, aux Dervallières, à Malakoff, dans les quartiers est et nord de Nantes, ainsi qu’au Château de Rezé, les familles monoparentales représentent entre ainsi entre 15 % et 22 % des ménages, soit deux à trois fois plus qu’ailleurs (8 % en moyenne). Cela illustre bien une des facettes de la géographie des inégalités sociales inscrites dans l’habitat.

Figure 4 : Des familles fortement concentrées dans les quartiers d’habitat social

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Pour citer ce document

François Madoré, 2020 : « Des familles monoparentales plus nombreuses et concentrées dans le logement social », in F. Madoré, J. Rivière, C. Batardy, S. Charrier, S. Loret, Atlas Social de la métropole nantaise [En ligne], eISSN : 2779-5772, mis à jour le : 23/04/2020, URL : https://asmn.univ-nantes.fr/index.php?id=433, DOI : en attente.

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Bibliographie

Buisson G., Costemalle V., Daguet F., « Depuis combien de temps est-on parent de famille monoparentale ? », Insee Première, n° 1539, 2015. https://www.insee.fr/fr/statistiques/1283845

Chardon O, Daguet F., Vivas E., « Les familles monoparentales. Des difficultés à travailler et à se loger », Insee Première, n° 1195, 2008. https://www.epsilon.insee.fr/jspui/bitstream/1/55/1/ip1195.pdf

Schneider V., « Portrait social des familles monoparentales », Observatoire des inégalités, 2016. https://www.inegalites.fr/Portrait-social-des-familles-monoparentales?id_theme=22

Villaume S., « Petites surfaces, surpeuplement, habitat dégradé : des conditions de logement plus difficiles après une séparation », Études et Résultats, n° 947, 2016. https://www.epsilon.insee.fr/jspui/bitstream/1/62100/1/er947.pdf

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François Madoré

Professeur de Géographie, Université de Nantes – IGARUN, UMR 6590 Espaces et Sociétés (ESO)

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Résumé

Les familles monoparentales ont beaucoup augmenté ces dernières décennies, conséquence de la fragilisation de la vie de couple et de la multiplication des ruptures d’unions. Elles sont constituées pour l’essentiel de femmes, ont un niveau de vie inférieur aux couples avec enfant(s) et sont bien plus souvent affectées par la pauvreté, du fait notamment d’un moindre accès à l’emploi. Elles occupent plus souvent un logement locatif social, d’où leur concentration spatiale dans les grands ensembles de la métropole nantaise.

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