Atlas Social de la métropole nantaise

Au-delà de la ville attractive

La géographie du logement social (1/2). Un parc insuffisant, mais mieux réparti dans la métropole nantaise

par Isabelle Garat

planche publiée le 30 mars 2023

Le parc de logement locatif social est apparu au début du XXe siècle dans les villes françaises. Depuis une vingtaine d’années, plusieurs lois ont conduit à une diffusion plus large de l’habitat social au sein des intercommunalités, à commencer par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) adoptée sous le gouvernement Jospin en 2000. Quelle est la géographie de ce type d’habitat dans l’espace de Nantes Métropole ? Et quels sont les bailleurs sociaux impliqués dans la gestion de ce parc de logement ?

20 % puis 25 % de logement locatif social

1La mixité sociale au sens de la diversification des statuts d’habitat (et donc du niveau de richesse des habitants) a été imposée aux différentes communes des agglomérations urbaines françaises. La loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, par son article 55, a ainsi obligé les communes de plus de 3 500 habitants – 1 500 en Île-de-France – comprises dans des intercommunalités de plus de 50 000 habitants et dont la ville centre compte plus de 15 000 habitants, à atteindre 20 % de logements sociaux. Puis, la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social a rehaussé ce seuil à 25 % (à atteindre en 2025) dans les zones tendues.

2Le programme local de l’habitat (PLH) de Nantes Métropole, en prévoyant de 2019 à 2025 la construction de 2 000 logements locatifs sociaux sur les 6 000 logements prévus, va même bien au-delà du seuil fixé par l’État, ce qui traduit une volonté politique métropolitaine dans ce domaine. Pourtant, seules les communes urbanisées le plus précocement (Nantes, Saint-Herblain), bénéficiaires du gros effort de construction des années 1950-1975, parviennent au seuil de 25 % (figure 1). Les autres poursuivent l’effort nécessaire, mais plus difficilement du fait notamment de la cherté actuelle du foncier.

Figure 1 - Un logement social plus répandu mais encore concentré au cœur de la métropole

Image

3Désormais, toutes les communes « métropolitaines » construisent des logements sociaux, mais parfois pas suffisamment vite, ce qui leur vaut des pénalités financières au titre de la loi dite SRU, sauf si elles sont exemptées de ces pénalités en raison de contraintes de protection de la nature sur leur territoire (abords du lac et des marais de Grand Lieu par exemple).

Le nombre de bailleurs augmente

4Les bailleurs sociaux « historiques » sont apparus au début du XXe siècle. Un office public d’habitations à bon marché est ainsi créé à Nantes dès 1913, un an seulement après la loi Bonnevay autorisant les municipalités à construire du logement social. Du côté des bailleurs sociaux privés, la société anonyme La Nantaise d’Habitation est la première entreprise sociale de l’habitat (ESH), créée en 1919 à Nantes.

5Nantes Métropole Habitat demeure le bailleur social le plus important de l’agglomération, avec 22 384 logements en 2019 (39 % du parc de logements locatifs sociaux de la métropole nantaise), loin devant le deuxième bailleur social public, Atlantique Habitation (7 037 logements). Parmi les ESH (figure 2), La Nantaise d’Habitations gère 8 837 logements locatifs sociaux, soit 15 % du parc locatif social de la métropole, la Société Anonyme des Marches de l’Ouest 6 301 (désormais intégrés à la CDC Habitat depuis 2019) et Harmonie Habitat 5 349.

Figure 2 - Dans la métropole, un gros bailleur social public et des bailleurs privés de taille moyenne

Image

Une meilleure répartition géographique des logements sociaux

6Avant la Seconde Guerre mondiale, le parc de logements locatifs sociaux était très réduit et concentré sur la commune de Nantes (figure 3). Comme ailleurs en France, 1950-1975 demeure la grande période de construction, car il faut alors répondre à la grave crise du logement, dans un contexte de croissance démographique et urbaine rapide. 38 % du parc de logements sociaux nantais datent de cette période et 15 % dans les communes proches (Rezé, Saint-Herblain…). La Maison radieuse de Rezé, dont les travaux débutent en 1953, ainsi que les Dervallières à Nantes, cité expérimentale édifiée de 1956 à 1965, sont les premières grandes opérations. Puis, dans les années 1960, les grands ensembles sortent de terre, avec deux zones à urbaniser en priorité (ZUP), l’une à Bellevue, partagée entre Nantes et Saint-Herblain, l’autre à Beaulieu Malakoff, le long de la Loire. Enfin, d’autres opérations d’envergure sont également réalisées : le Pin Sec et Bottière à Nantes, le Château de Rezé, Le Bois Saint-Louis à Orvault. Cette période d’intense construction de logements sociaux se termine dans les années 1970, avec le Clos Toreau et Port Boyer à Nantes, et le Sillon de Bretagne à Saint-Herblain.

Figure 3 - Évolution de la part de logements locatifs sociaux dans Nantes Métropole par période

Image

7Le regain constructif intervient de 2000 à 2018 et touche toutes les communes de la métropole. Ceci s’explique notamment par le fait qu’à partir de 2008 Nantes Métropole a bénéficié d’une délégation des aides à la pierre, suite à l’adoption de la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004, ce qui a favorisé la redistribution locale des prêts constructifs. Malgré l’indéniable dynamique constructive et le volontarisme politique local, les pourcentages de logements sociaux peinent pourtant à s’élever vers les seuils attendus - ou à s’y maintenir - tant la forte dynamique d’investissement locatif privé tire les prix vers le haut et accentue la concurrence sur le foncier, tout en augmentant le stock de logements existants à partir duquel sont calculés les taux de logements locatifs sociaux par commune.

Pour citer ce document

Isabelle Garat, 2023 : « La géographie du logement social (1/2). Un parc insuffisant, mais mieux réparti dans la métropole nantaise », in F. Madoré, J. Rivière, C. Batardy, S. Charrier, S. Loret, Atlas Social de la métropole nantaise [En ligne], eISSN : 2779-5772, mis à jour le : 30/03/2023, URL : https://asmn.univ-nantes.fr/index.php?id=880, DOI : https://doi.org/10.48649/asmn.880.

Autres planches in : Habiter et se déplacer

Carte : M. Guinepain, S. Charrier, 2024.

Les journées des travailleur⋅ses de Loire-Atlantique : quelle diversité au-delà de l’opposition centre-périphérie ?

par Maxime Guinepain

Voirla planche intégrale 

Photo : L. Amaré.

Des ateliers d’autoréparation de vélo concentrés dans le cœur de Nantes Métropole

par Lola Amaré, François Madoré et Béatrice Chaudet

Voirla planche intégrale 

Photo : Mairie de Dompierre-sur-Yon, 2011.

Un jardin à tout prix ? Acquéreurs de maisons et terrains à bâtir dans l’aire urbaine de Nantes (2000-2012)

par Michaël Bermond, Maxime Marie et Jean Rivière

Voirla planche intégrale 

Carte : Le Bivic, Mellot, Devisme, Charrier - 2022.

L’urbanisation dans les périphéries du pôle urbain nantais. Le rôle des opérateurs de logements individuels

par Camille Le Bivic, Romain Melot et Laurent Devisme

Voirla planche intégrale 

Carte : E. Walker, S. Charrier - 2022.

La métropolisation nantaise au prisme des achats d’appartement (3/3). La fabrique des prix immobiliers

par Étienne Walker

Voirla planche intégrale 

Carte : E. Walker, S. Charrier - 2022.

La métropolisation nantaise au prisme des achats d’appartements (2/3). Des marchand·es de bien et SCI qui investissent en centre-ville, des services publics et administrations qui s’excentrent

par Étienne Walker

Voirla planche intégrale 

Photo : Jean-Pierre Dalbéra, - 2012.

La métropolisation nantaise au prisme des achats d’appartements (1/3). Des cadres locaux aux « Parisien·nes », une socio-géographie des acheteur·ses

par Étienne Walker

Voirla planche intégrale 

Carte : S. Charrier - 2022.

Le boom des entreprises de réparation de vélos particuliers dans Nantes Métropole

par Jean Favreau

Voirla planche intégrale 

Photo : C. Chauvet, 2020.

À Nantes, une pratique du vélo en plein essor mais encore marginale dans les modes de déplacement

par François Madoré et Valentin Chapalain

Voirla planche intégrale 

Photo : F. Barde - 2010.

Bidonvilles, précarité et antitsiganisme dans l’agglomération nantaise (2/2)
Politiques publiques et habiter de résistance

par Frédéric Barbe et Jade Maillard

Voirla planche intégrale 

Photo : F. Barbe, 2010.

Bidonvilles, précarité et antitsiganisme dans l’agglomération nantaise (1/2).
Vivre et habiter en bidonvilles

par Frédéric Barbe et Jade Maillard

Voirla planche intégrale 

Photo : C. Chauvet - 2020.

Le retour en grâce du tramway... sans remise en cause de l’hégémonie de la voiture

par François Madoré

Voirla planche intégrale 

Carte : S. Charrier - 2020.

Quand la métropole déborde

par Sylvain Grisot

Voirla planche intégrale 

carte : B. Mericskay, 2020.

Les mutations de la géographie des prix de l’immobilier résidentiel

par Boris Mericskay, Jean Rivière et Stéphane Loret

Voirla planche intégrale 

AD de Loire Atlantique, fonds Underberg (318 J)

Avant la « voiture pour tous »

par Christophe Batardy

Voirla planche intégrale 

graphique : F. Madoré, S. Charrier - 2020

L’internationalisation de la métropole vue à travers le trafic passagers de son aéroport

par François Madoré

Voirla planche intégrale 

photo : C. Chauvet - 2019.

La voiture partout dans l’aire urbaine et plus encore dans le périurbain

par François Madoré

Voirla planche intégrale 

carte : C. Batardy, S. Charrier - 2019

Un parc de logement profondément transformé sous l’effet de l’étalement urbain

par François Madoré et Isabelle Garat

Voirla planche intégrale 

carte : S. Charrier - 2019

Le covoiturage via BlaBlaCar, une infrastructure invisible dans la ville

par Boris Mericskay et Sylvain Grisot

Voirla planche intégrale 

photo : C. Chauvet - 2019

Les rues privées : entre banalisation géographique et poches de concentration

par François Madoré

Voirla planche intégrale 

Bibliographie

Halgand M.-P., Pasquier E., La construction d’un patrimoine : de l’office public d’HBM à Nantes Habitat, Nantes, Nantes Habitat, 1993.

Guilbaud S., « Nantes Habitat 100 ans de logement social », Place Publique, n° spécial, 2013.

Solutions and Co (Agence de développement économique des Pays de la Loire), « Une offre modérée et géographiquement concentrée, une demande localement forte », 2021.

Stébé J.M., Le logement social en France, Paris, Presse universitaires de France, 2022.

Index géographique

Isabelle Garat

Maître de conférences HDR en Géographie, Nantes Université, UMR 6590 Espaces et Sociétés (ESO)

Toutes les planches de l'auteur

Les derniers dépôts dans HAL-SHS de Isabelle Garat

8146dfd37418625942cead0fe71394fd
Isabelle Garat

Résumé

Le parc de logement locatif social est apparu au début du XXe siècle dans les villes françaises. Depuis une vingtaine d’années, plusieurs lois ont conduit à une diffusion plus large de l’habitat social au sein des intercommunalités, à commencer par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) adoptée sous le gouvernement Jospin en 2000. Quelle est la géographie de ce type d’habitat dans l’espace de Nantes Métropole ? Et quels sont les bailleurs sociaux impliqués dans la gestion de ce parc de logement ?

Statistiques de visites

Du au

* Visites : "Nombre de visites qui ont inclus cette page (planche) ou nombre de visites uniques. Si une page a été vue plusieurs fois durant la visite elle ne sera comptabilisée qu'une seule fois".
** Total : sur la période sélectionnée.
*** Hits : "Le nombre de fois que le site ou cette page a été visité(e)".